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Polémique Harlequin autour de la traduction IA

Harlequin pointé du doigt par les traducteurs pour son recours à l’IA

Depuis hier, le nom d’Harlequin est au centre d’une polémique qui agite le monde de la traduction littéraire. Le 15 décembre 2025, l’Association des traducteurs littéraires de France (ATLF) a rendu public un communiqué, rédigé avec le collectif En chair et en os, dénonçant une bascule progressive de l’éditeur vers des traductions réalisées par intelligence artificielle. Une accusation sérieuse, qui relance un débat brûlant dans l’édition, en particulier dans le secteur de la romance.

Un communiqué publié le 15 décembre 2025 visant directement Harlequin

Intitulé « Bradage de la traduction, plan social invisible : Harlequin passe à l’IA« , le communiqué a été publié le 15 décembre 2025 et relayé le jour même sur LinkedIn et Instagram par l’ATLF, avant d’être largement partagé par le collectif En chair et en os. Le texte décrit une transformation rapide des pratiques de traduction chez Harlequin, touchant un de nombreux titres (toujours selon les témoignages relayés).

Selon les organisations signataires, l’éditeur aurait apparemment recours à des traductions générées par IA, confiées ensuite à des traducteurs humains chargés d’en assurer la post-édition. Un travail que les organisations signataires présentent comme moins rémunéré qu’une traduction intégrale, et accompagné, dans plusieurs cas, de la rupture pure et simple de collaborations de longue date.

Le communiqué évoque des appels téléphoniques reçus « depuis quelques semaines » par plusieurs dizaines de traducteurs et traductrices réguliers de la maison, leur annonçant soit la fin de leur mission, soit une redéfinition de leur rôle dans des conditions jugées dégradées. Les auteurs du texte parlent d’un « plan social invisible », mené sans communication publique.

Une dénonciation inscrite dans un combat plus large contre l’IA en traduction

La prise de position de l’ATLF et du collectif En chair et en os ne surgit pas de nulle part. Depuis plusieurs années, ces organisations alertent régulièrement sur les effets de l’intelligence artificielle dans la traduction littéraire. En 2023 et 2024, plusieurs tribunes, enquêtes et manifestes ont été publiés pour dénoncer l’opacité croissante des usages de l’IA dans l’édition et la dégradation des conditions de travail des traducteurs.

Le collectif En chair et en os, né en 2023, a notamment diffusé de nombreux témoignages décrivant des situations similaires dans différents secteurs culturels. Dans ces récits, les traducteurs racontent comment des textes générés par IA leur sont imposés, sans transparence envers les lecteurs, et avec des rémunérations revues à la baisse.

Dans ce contexte, le cas Harlequin apparaît comme l’un des plus frontaux à ce jour. Contrairement à d’autres situations évoquées anonymement, le communiqué cible explicitement l’éditeur, ce qui explique l’ampleur immédiate de la réaction dans le milieu professionnel.

Romance, IA et opacité : un malaise ancien dans l’édition

La romance n’est pas étrangère à ces débats. En février 2024, Le Monde évoquait déjà la montée en puissance de l’IA dans l’édition (article disponible en cliquant ici), citant les romans sentimentaux parmi les premiers segments concernés par la traduction automatisée. Un choix souvent justifié, en interne, par des logiques de volume, de rentabilité et de délais.

Le monde évoquait déjà l'utilisation de l'IA dans cet article

D’autres polémiques ont jalonné ces dernières années. L’ATLF s’est ainsi opposée par le passé aux pratiques d’AmazonCrossing, la filiale d’Amazon dédiée à la traduction, dénonçant des conditions de travail jugées industrielles. Plus récemment, plusieurs articles de presse ont fait état d’éditeurs français demandant à des traducteurs de travailler à partir de versions pré-traduites par IA, sans que cette information ne soit mentionnée sur les livres.

Plus largement, au-delà du cas Harlequin, la question dépasse la seule traduction. Depuis 2023, l’utilisation de l’intelligence artificielle dans la création de couvertures de livres suscite également des débats. Certains éditeurs indiquent explicitement le recours à l’IA dans les mentions légales, tandis que d’autres sont accusés de dissimuler cette pratique, notamment en créditant des artistes utilisant eux-mêmes des outils génératifs.

Aucune prise de parole publique d’Harlequin à ce stade

À l’heure où ces lignes sont écrites, aucune réponse officielle d’Harlequin France ou de HarperCollins France n’a été rendue publique concernant les accusations formulées par l’ATLF et le collectif En chair et en os. Les informations qui circulent proviennent exclusivement des organisations de traducteurs et des relais associatifs.

Nous avons contacté l’éditeur afin d’obtenir des précisions sur sa politique en matière de traduction et d’usage de l’intelligence artificielle. Pour l’instant, aucune réponse ne nous est parvenue. Étant donné la fraîcheur de la polémique, une prise de position pourrait toutefois intervenir dans les prochains jours, si ce n’est les prochaines heures.

En attendant, l’affaire Harlequin met en lumière une tension de plus en plus visible entre logique industrielle et exigence littéraire. Une fracture qui traverse aujourd’hui toute l’édition, et dont la romance, longtemps considérée comme un laboratoire de pratiques éditoriales, semble une nouvelle fois être le terrain d’expérimentation.

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